Plus d’une heure que Robert Nesta arpentait les allées de la bibliothèque militaire de Central sans réussir à trouver son bonheur. Il avait bien trouvé quelques ouvrages traitant du sujet qui l’intéressait mais ils étaient tous très sommaires. Ils se contentaient de lister des banalités et dirigeaient le lecteur vers un autre livre pour plus d’informations. Ce fameux livre sur lequel il n’arrivait pas à mettre la main.


Il venait de se faire attribuer sa nouvelle mission. Dans deux jours, il devrait prendre le train pour l’Est afin de mettre en place des Cropcircles au nord de Resembool et profiter du train de retour pour escorter les récoltes des champs de East City. 48h pour tout préparer, ses supérieurs n’avaient vraiment aucune idée de la complexité de ce procédé. Et ce satané livre qui ne voulait pas se montrer n’allait pas l’aider à être prêt dans les temps.
Il errait désespérément dans le bâtiment en examinant un à un les noms de chaque livres qui formaient ces immenses murs de connaissance. Il avait abandonné son manteau à capuche sur sa chaise, en compagnie des piles de bouquins inutiles qu’il avait entassés depuis son arrivée. Son exaspération ne cessait de monter. Il pestait intérieurement contre toutes les personnes potentiellement responsables de la disparition de l’ouvrage. Les employés de la bibliothèque incompétents, les personnes ayant lu le livre par le passé, même les auteurs en prirent pour le grade.


Robert s’arrêta entre « Steven Boulot, la naissance d’une étoile » et « Steven Boulot, la chute d’un escroc ». Frustré de voir que ces deux livres avaient été classés chronologiquement et alphabétiquement, il prit la décision de ne pas en infliger plus à sa patience. Il était préférable de sortir décompresser en sirotant un vers en ville. Détruire une aile de la grande bibliothèque de l’armée ne l’aiderais pas à se faire bien voir de ses supérieurs. Il retourna donc à sa table où il agrippa une pile de livre, se retenant de ne pas les faire voler à travers la pièce. Il prit la direction du bureau de la personne chargée de les remettre en rayon mais s’arrêta immédiatement. Son regard s’arrêta sur une jeune femme penchée sur une pile de document. Il avait dû lui passer une dizaine de fois sans même l’apercevoir, trop occupé à fulminer. Mais plus que sa présence, c’est sa chevelure qui l’avait arrêté. Ses longues boucles châtain lui rappelaient une période de sa vie qu’il cherchait à éviter. Il reprit rapidement ses esprits, se forçant à ne pas penser à son adolescence. Cependant son regard continuait de bloquer dans sa direction et c’est à ce moment qui l’aperçu. Là sous son nez alors qu’il le cherchait depuis des heures. Un livre noir qui portait comme inscription sur la reliure : « études des sols et climats des régions de l’Est ». Il était fermement coincé entre la table et le coude de la jeune femme qui s’en servait d’appuis.


*EVIDEMENT ! C’est l’utilisation qu’il faut faire d’un bouquin * s’exclama intérieurement l’alchimiste d’état sans laisser transparaitre la moindre once de colère sur son visage. Il arma son sourire le plus aimable et avança vers elle, la pile de livre sous le bras. Arrivé vers sa table il se racla doucement la gorge et appuya son sourire. Son visage semblait crier « faite-moi confiance, je suis gentil », même ses yeux paraissaient sourire derrière ses lunettes.

-Excusez-moi ? vous travaillez ici?

-Excusez-moi ? Vous travaillez ici?

La jeune femme sursauta brusquement, levant ses yeux débordant de larme vers l'homme qui venait de lui adresser la parole. Plutôt grand sans être un géant, l'homme, la trentaine, était brun et aborder un visage doux et souriant. Ses yeux étaient dissimulé derrière des lunettes teintés à la monture alliant cuire et métal. La jeune femme se fit la réflexion qu'il ne devait pas y voir grand-chose. La bibliothèque était un endroit sombre malgré les allogènes qui pendaient du haut plafond.

Extrêmement gêné de la situation, Hanae baissa la tête brusquement et s’essuya en vitesse ses larmes. Ses cheveux, retombant à nouveau, cachèrent son visage mais elle ne chercha pas à les remettre en place. Elle de relever timidement la tête, gardant précieusement ses mains sous la table pour cacher leurs léger tremblements. Elle devait surement rougir, elle sentait ses joues chaudes. C’était très gênant de se mettre à pleurer dans un lieu « public ». Beaucoup de personnes venaient ici pour travailler et se mettre à sangloter ne devait pas aider les gens à se concentrer. Même si ce n’était pas la première fois pour elle de se mettre dans des états pas possible juste à la penser de son frère ainé.

Un sourire tendre - quoi qu’un peu forcé – apparut sur le visage de la jeune femme qui essaya de paraître détendu.

« Désolé, non. Je suis seulement venue ici pour faire des recherches pour un rapport. »

Prit d’un élan de curiosité, et aussi pour essayer de faire taire sa gêne, elle enchaîna poliment.

« Je peux peut-être vous aider néanmoins ? »

Ses mains agripper furieusement un pan de sa jupe pour essayer de se détendre. Aujourd’hui, elle s’était habillé d’une chemise blanche et d’une jupe marron, accompagné d’escarpin de la même couleur. Abandonnant son uniforme militaire habituel, elle avait passé la journée à la bibliothèque avec seulement ses dossiers à corriger et son badge d’accès. Il était donc normal que l’homme est pu croire qu’elle travailler ici.

L’alchimiste n’avait pas remarqué avant de l’aborder que la jeune femme sanglotait. Et malgré toutes les précautions qu’il prit pour ne pas la surprendre, elle sursauta en entendant sa voix.

*Encore une jeune incapable de contenir ses émotions… Si elle a osé détériorer mon livre avec ses larmes …* Il continuait à fulminer intérieurement en arborant un grand sourire. Cependant il ne voulait pas la brusquer. Même si il était presque sûr de pouvoir obtenir ce qu’il voulait d’elle en haussant un peu la voix, il n’était pas dans son habitude de procéder ainsi. La diplomatie e toujours été une arme plus efficace sur le long terme.

-Oh pardon, je ne voulais pas vous faire peur.

Il se passa la main dans les cheveux, se donnant l’air gêné. La jeune femme s’était caché l’espace d’un instant derrière ses cheveux. Mais l’attitude de Nesta semblait avoir eu l’effet prévu et elle se redressa en souriant. Il fut soulagé de ne pas avoir à chercher à en savoir plus sur l’origine de ses sanglots. La vue de son visage au teint pâle, ses taches de rousseur et ses yeux en larme avait au moins eu pour effet d’effacer l’image de son passé.
Comme il s’en doutait, elle ne travaillait pas pour la bibliothèque mais, il s’y attendait, elle se pressa de tout de même lui proposer son aide.

- Je peux peut-être vous aider néanmoins ?

-Et bien peut être, qui sais ? Je dois entreprendre une mission dans l’est d’ici peu et je recherche des informations sur le climat et les sols de la région. Plus d’une heure que je cherche mais impossible de trouver quelque chose de précis dans le chao instauré par ces bibliothécaires de l’armée.

Robert prit soin de bien faire paraitre cela comme une blague pour détendre l’atmosphère et non comme une vraie attaque contre les employés de la bibliothèque. Il laissa même échapper un petit rire discret. Il continuais à feindre de ne pas avoir remarqué la présence de l’ouvrage sur la table. Il voulait savoir comment elle réagirait, si elle allait lui donner le livre, ou si elle avait même conscience d’écraser sous son coude un document d’une grande valeur.

-Ça dépend quel ouvrage vous cherchez. J’en ai quelques-uns sous la main mais je m’en sers également pour mes dossiers.

L’alchimiste avait réussi à se calmer en voyant son livre, mais il commençait de nouveau à s’impatienter. De plus, son humour ne semblait pas faire d’effet. Il prit sur lui pour ne pas laisser son interlocutrice comprendre le fond de sa pensée. Il posa délicatement sa pile de livre sur la table pour libérer son bras et s’appuya sur la table.

-Et bien, après tout ce que j’ai pu lire, il semblerait qu’un seul livre soit assez précis pour me fournir les informations que je recherche. Il feignit de réfléchir un instant. Etudes des sols et climats des régions de l’Est

Elle l’écoutait tout en s’occupant de sa coiffure, ce qui avait le don d’exaspérer Robert. Encore une fois, l’homme dissimula sa frustration et fit mine de ne pas y faire attention. Elle reprit son stylo et se remit au travail.

-Asseyez-vous. Vous n’allez tout de même pas attendre debout que je finisse mon travail quand même

*Elle croit quand même pas que je vais la regarder comme un niai en attendant qu’elle finisse son boulot ?* se dit-il en acceptant tout de même de s’assoir. Il prit la chaise la plus proche de lui, à savoir celle juste à côté de la jeune femme et s’y assit. Il instaurait ainsi une certaine proximité avec elle sans pour autant l’oppresser. Il pouvait également regarder plus facilement, et sans être vu, le contenu du rapport de la jeune femme malgré sa mauvaise vue.

- Pardonnez-moi je ne me suis pas présenté. Robert Nesta. Serait-ce indiscret de vous demander sur quoi porte vos recherche exactement ?

Robert comprit rapidement que s’assoir aussi prêt de Hanae, puisque tel était son nom, avait le résultat opposé à ce qu’il espérait. De plus elle ne réagit même pas en entendant le nom du livre qu’il recherchait. Il n’arrivait pas à déterminer si la jeune femme était déterminée à ne pas lui dire qu’elle l’avait ou si elle était simplement trop sotte pour s’en rappeler. Il décida donc de changer de stratégie et de remettre de la distance entre eux.

- Sur pas mal de choses. Je complète différent dossier.

Il était maintenant clair qu’elle se fermait de plus en plus. L’homme se releva lentement et fit le tour de la table. Il avait cependant eu le temps de lire suffisamment de ce qu’elle écrivait pour comprendre qu’il ne s’agissait que de reprendre les notes de quelqu’un d’autre.

-Ne prenez pas mal mon indiscrétion, j’aurais peut-être pu vous apporter mon aide, si infime soit-elle.

Il sortit sa montre d’argent de sa poche et regarda brièvement l’heure. Il l’a rangea tout aussi rapidement à sa place et s’adressa à nouveau à la jeune femme.

-Le temps file. Il semble que nous n’aurons finalement pas le temps de profiter tous les deux de ce livre. Je ferais mieux de commencer à ramener mes livres à cette dame avant qu’elle ne finisse son service.

Il avait cette fois l’intention de bien lui faire comprendre qu’il savait qu’elle avait le livre, sans pour autant avoir l’air de l’accabler. Il récupéra la pile de livre qu’il avait déposé sur la table et se dirigea vers le bureau de la dame en question. Il lui tendit la pile de livre en indiquant les informations d’usage et en précisant qu’il lui restait d’autres livres. Il passa devant la table de la jeune femme pour récupérer une autre pile de livre sur la sienne puis retourna vers le bureau. Il lui restait encore deux allé retour à faire avant d’avoir ramené tous les livre. Il n’en revenait toujours pas d’avoir lu autant de stupidité alors que les informations qu’il recherchait étaient justes là. Il était clair pour lui qu’il n’allait pas quitter la bibliothèque sur un tel échec et laisser cette petite secrétaire profiter plus longtemps de SON livre.

Robert fit encore deux voyages, une pile de livre sous le bras. Il traversa encore une fois la longue salle jusqu’à sa table. Il saisit son manteau avec précaution et l’enfila dans un mouvement souple et ample. Il défroissa ses manches et prit la direction de la sortie. Il s’arrêta au niveau de la table d’Hanae.

-Voilà une bonne chose de faite. Il marqua un temps et se tourna vers elle. Il est temps pour moi d’y aller, ce fut un plaisir de vous rencontrer, mais …

Il lui adressa un nouveau sourire mais il ne semblait plus du tout aimable. Il dégagea le pan droit de son manteau pour mettre sa main dans la poche de son pantalon.

-Navré que vous ayez mal saisi ce que je vous ai dit plus tôt. Mais lorsque je disais que l’un de nous deux ne pourrait pas profiter du livre, je parlais de vous bien évidement.

Il posa lourdement sa main gauche sur le livre qui se trouvait juste devant lui. Il sortit sa main de sa poche, tenant sa montre en argent. Il jeta mollement sur la table ce signe de son rang d’alchimiste d’état, relié à sa ceinture par une petite chaine. Il continuait à lui parler tout en faisant glisser le livre vers lui.

-Comme je vous l’ai dit, j’ai une mission à remplir sous peu et le délai ne me permet pas de privilégier le travail d’une secrétaire sur le mien. Ne voyez pas cela comme une attaque personnelle.

Il finit de faire glisser le livre jusqu’à son coté de la table et l’empoigna. Il tira sa montre par la chaine puis la rangea dans sa poche. Il esquissa un dernier sourire lui donnant l’air d’être satisfait. Il fit volt face et pris la direction de la sortie ou une jeune femme au lunette ronde était chargée de remplir le registre des documents quittant la bibliothèque.