Un magnifique après-midi se profilait à l’horizon, le genre d’après-midi que l’on passe à dormir au soleil ou bien à patauger dans l’eau, mais ce n’était certainement pas un après-midi à passer dans un bâtiment où il faisait, certes, frais mais qui rimait avec travail, sueur, et surtout qui rimait avec « adieu après-midi à se prélasser sans rien faire ». Atsuko en était là de ses considérations quand elle s'aperçut qu'elle était arrivée devant la porte du bureau où elle était convoquée. Elle ne connaissait absolument pas ce Rolando Balkman, elle ignorait même qui il était, c’est dire si elle ne mettait pas souvent les pieds au Quartier Générale de Central. Juste pour les formalités au final. La jeune femme s’arrêta quelques instants devant la porte du bureau où était fixée une petite plaque dorée où étaient inscrits les mots « Général de division Rolando Balkman ».

-Eh ben rien que ça. Murmura-t-elle.

Elle toqua à la porte et aussitôt une voix grave et posée lui répondit.

-Vous pouvez entrer.

Elle poussa la porte et entra. Le bureau du Général était une vaste pièce qui semblait vide, peut-être étais-ce du à l’absence du personnel de travail. Cependant elle était aménagée avec gout, le canapé semblait moelleux et confortable à souhait et le mobilier était de facture luxueuse. Mais ce qui attira l’attention de la jeune femme c’est le bureau, à l’image de son propriétaire, d’une belle couleur sombre on aurait dit qu’il avait été fait pour Balkman. Tout comme le tigre en or massif qui semblait bien refléter le caractère du personnage. Un autre trait de caractère que remarqua Atsuko était ce souci du rangement, dans ses dossiers aucune feuille ne dépassait, le bureau avait beau être chargé il n’y avait pas de désordre apparent et elle en conclut que le mobilier et la pièce entière étaient à l’image de cet homme, droit et inébranlable. Dire que l'homme assis était un géant était un euphémisme, Rolando Balkman paraissait immense bien qu'il soit assis et pour Atsuko qui mesurait un petit mètre 66 elle n'avait pas l'avantage de la taille. L'homme en imposait d'autant plus qu'il avait gardé ses lunettes teintées et que la jeune femme ne pouvait deviner s'il la regardait et quelle expression il faisait. Sa barbe et sa chevelure blanche le vieillissaient mais lui donnait une certaine classe et imposait le respect tout comme son visage marqué par son passé qui avait certainement été rude et peu joyeux.
Il lui fit signe de s’assoir, ce qu’elle fit avec plaisir en voyant le fauteuil qu’il lui désignait. Elle croisa les jambes et le Général commença sans préambule.

-Bien j'irais droit au but mademoiselle. J'ai cru comprendre que vous vous y connaissiez en matière d'alchimie anatomique et en transformation du corps. Vous la pratiquez d'ailleurs sur vous, lorsque vous transmutez vos sortes de griffes n'est-ce pas ?
Aussi j'aurais besoin de vos compétences pour un travail particulier. Depuis plusieurs semaines des scientifiques sous mes ordres planchent sur la mise au point d'une chimère. Mais pas n'importe laquelle, pas des chimères animales, non, ici il est question d'une chimère bien plus puissante et évoluée. Un modèle unique, la plus perfectionnée, puissante et aboutie de toutes. Je veux que vous assistiez mes chercheurs dans ce travail.

Au fur et à mesure du discours du Général son cerveau se mit à fonctionner à plein régime. Une chimère, rien que ça ? Voilà la réponse à une des questions qu’elle se posait, cependant cette réponse ne lui plaisait guère ayant déjà eu un aperçu de ce que pouvais faire l’armée avec ce genre de puissance, il suffisait de voir la guerre d’Ishval pour comprendre que ce type de créatures n’était pas crée pour la déco. Elle garda une attitude neutre mais en elle, les émotions bouillonnaient, d’un autre côté elle était curieuse de savoir jusqu’où pourraient aller les ambitions de l’armée. Elle s’enfonça un peu plus dans le fauteuil attendant les arguments qu’il avancerait pour la convaincre. Le Général marqua un arrêt le temps de servir deux verres de rhum avant de poursuivre.

-Ce sera l'occasion de prouver votre valeur, voir de vous faire un appui dans les hautes sphères de l'armée si le travail est bien fait. Ce qui n'est jamais négligeable quand on est jeune et que l'on veut progresser. Qu'en dites-vous ?

La jeune femme esquissa un sourire. Alors voilà comment on procédait dans les hautes sphères, on vous saoulait avec un excellent alcool et on vous menaçait de vous mettre des bâtons dans les roues si vous refusiez. Elle prit le verre mais ne toucha pas au liquide transparent qui tournoyait lentement dans le récipient.

-Mes excuses Général mais vous me voyez au regret de refuser votre proposition. C’est une chose que de modifier son propre corps mais c’en est une autre de faire des expériences sur des êtres humains ou même des chimères. De plus en quoi mon alchimie peut-elle vous être utile ? N’y a-t-il pas des biologistes tout à fait capables de s’en occuper ? J’ajouterais aussi que ce que vous vous apprêtez à créer risque d’être rapidement incontrôlable, êtes vous conscient des risques que vous faites courir à vos chercheurs et à la population, par extension ?

Atsuko reposa le verre sur le bureau et se leva.

- Je ne pense pas que nous puissions collaborer. Mes principes me l’interdisent et cela m’est bien égal si des portes me sont fermées. Sur ce je vous souhaite une bonne après-midi Général.

La jeune femme se dirigea vers la porte signifiant que, pour elle, l'entretient était terminé.

La main d’Atsuko était restée en suspend au-dessus de la poignée, la proposition s’était transformée en ordre. Cela la contrariait fortement, bien qu’elle sache pertinemment qu’elle n’y couperait pas, elle avait horreur des ordres. Elle alla se rassoir non sans une certaine touche d’exaspération et écouta le discours de son supérieur. Elle sourit à l’entente de sa dernière phrase.

-Oui ce serait dommage de gaspiller mais, voyez vous, je ne bois pas.

Elle fit une pause et sa cala confortablement dans son fauteuil puisque apparemment elle en avait encore pour un moment.

-Pour en revenir à cette chimère, je suis désolée de vous décevoir mais je n’ai pas fait la guerre du même côté que vous. Je m’explique, la guerre je l’ai vu du côté des victimes, des gens qui ont tout perdu à cause des soldats qui ont dévasté les campagnes par lesquelles ils passaient, vous comprendrez donc mon aversion pour ce que vous êtes en train de me proposer, je me refuse à créer une machine de guerre qui fera encore plus de victimes. De plus je ne suis pas entrée chez les alchimistes d’état pour participer à ce genre d’expériences, telle n’est pas mon ambition.

Elle se mit à jouer avec une mèche de cheveux, signe d’agacement.

-Pour créer une bonne chimère de combat il vous faut combiner les ADN et les capacités d’une dizaine d’animaux, vos scientifiques sauront-ils faire cela ? Votre « cobaye » sera-t-il capable de résister à cette implantation ?

Elle cracha le mot « cobaye », comme si des lames lui écorchaient la langue, dieu sait qu’elle détestait ce genre d’expériences et elle n’avait qu’une seule envie, celle de quitter ce bureau au plus vite. Cependant son la retenait de le faire et elle supporta donc le regard caché par des lunettes sombres de son supérieur.

-Je pense, Monsieur, que le problème réside dans le fait que je n’ai pas fait la guerre comme vous et je n’ai accédé au rang d’Alchimiste d’état qu’après la fin de cette guerre. J’ajouterais aussi que je n’ai fait ceci que pour les avantages que le poste m’offre, à savoir un accès à certains bâtiments et informations qui ne le sont pas pour un simple civil ou un militaire. Je ne contribuerais jamais à la création d’une de vos abominations, ordre ou non.

Elle le regarde droit dans les yeux ou du moins ce qu’elle pensait être ses yeux.

-je vous poserais une dernière question : Qu’en pense le Généralissime ?

Enfin elle avait pu voir ses yeux, c’étaient des yeux perçants, des yeux qui avaient vu la guerre, qui avaient fait la guerre, c’étaient des yeux qui lui confirmaient qu’il ne laisserait pas tomber tant qu’il n’aurait pas eu ce qu’il voulait. Elle sourit, un bras de fer avec son supérieur lui plaisait fortement et cela faisait longtemps qu’elle n’avait eu l’occasion de tester ses positions.

-Oui c’est vrai, vous avez raison, je fais passer mes intérêts personnels avant le reste parce que je suis humaine et que l’égoïsme fait partie de nous. L’être humain ne peut s’empêcher d’être égoïste. Mais mes intérêts servent mes principes, vous pensez tout savoir mais ce n’est pas le cas. Et je suis loin d’être naïve, je sais à quel point l’armée est pourrie jusqu’à la moelle, heureusement qu’il y a des gens comme Mustang que vous dénigrez tant pour remonter un peu le niveau.

Elle posa ses coudes sur le bureau, croisa les mains et mis sont menton dessus.

-puisque vous avez l’air d’aimer la franchise je vais donc être franche avec vous. Vous êtes un fieffé connard et je comprends pourquoi vous êtes arrivé aussi loin dans l’armée. Cependant je doute que le Généralissime vous laisse faire sans intervenir, j’ai ouïe dire qu’il aimait bien tout contrôler. Et je pense que vous ne lui avez pas révélé la moitié de votre plan.

Elle se mit à jouer avec les stylos et autres babioles présentes sur le bureau de Balkman, dans le seul but de l’enquiquiner. La jeune femme savait qu’il en fallait plus pour énerver son supérieur mais cela l’amusait et lui faisait passer le temps.

- Le pouvoir, vous n’avez que ce mot à la bouche mais je vous ai déjà dit que je n’en voulais pas. Cela ne m’intéresse pas, ne l’avez-vous pas compris ? Et n’avez-vous pas compris que je ne souhaite pas voir vos chimères ? Je vous crois sur parole quand vous parlez de merveilles, mais moins je les vois, mieux je me porte.

La jeune femme porta la main à sa ceinture et ouvrit sa pochette d’où elle sortit une montre à gousset en argent. Elle se mit à la faire tourner dans sa main puis releva la tête vers lui. Elle poussa un soupir.

- Je suppose que vous ne me laisserez pas quitter votre bureau tant que je n’aurais pas accepté. Soit, l’air se fait étouffant ici et j’ai besoin de prendre l’air, pour quand voulez-vous ce rapport ?

Atsuko avait rivé son regard à celui de Balkman et souriait en attendant sa réponse.

Décidemment la jeuen femme savait se défendre. Sa première réaction en était la preuve. Contrairement à beaucoup d'autres elle admettait parfaitement que son égoïsme prenne le pas sur ses principes, et que ça ne la dérangeait nullement tant que cet égoïsme pouvait lui permettre d'être en accord avec ses principes. Difficile de contre-dire cette logique bien peu répendue mais ô combien juste. Puis elle continau dans les pseudos menaces avec le Généralissime insultant même au passage le Général, sa réflexion tira un sourire, amusé, énervé, difficile de dire, surement un peu des deux:

-Vous croyez que le Généralissime n'a que ça à faire, contrôler tout ce qui se passe ? Une personne seule ne leu peut, même lui. C'est pour ça que nous sommes la les généraux, nous sommes ses yeux, ses oreilles et ses bras. Il nous fait confiance. Et selon vous seul une espèce d'ordure peut arriver au sommet, concept intéressant...

Il marqua une pause mais son interlocutrice repris de plus belle tout en jouant avec un stylo du Général de Division:

- Le pouvoir, vous n’avez que ce mot à la bouche mais je vous ai déjà dit que je n’en voulais pas. Cela ne m’intéresse pas, ne l’avez-vous pas compris ? Et n’avez-vous pas compris que je ne souhaite pas voir vos chimères ? Je vous crois sur parole quand vous parlez de merveilles, mais moins je les vois, mieux je me porte.

La jeune femme commençait mine de rien à être...exaspérente, mais le Général avait un excellent self-control. Il la laissa continuer, puis finalement elle se rendit à l'évidence, elle allait exéctuer l'ordre. Elle avait beau dire ce qu'elle voulait, faire des discours, au final elle était comme les autres obligée d'obéir et ça ça remplissait le Général de satisfaction, car c'était bien pour ça qu'il avait gravi les échelons, pour imposer sa volonté aux autres. Il n'avait jamais croisé personne qui avait bravé un ordre au point de tout perdre, à part une fois. Pour les autres la crainte de perdre tous les avantages liés à l'armée était toujours la plus forte.
Une fois que la jeune femme eut finit Balkman la fixa aussi dans les yeux, mais à travers ses lunettes. Il devait reconnaitre ça, elle avait un sacré regard, beau et déterminé à la fois. Il finit par sourir:

-Je savais bien qu'on finirait par s'entendre. Vous avez deux semaines pour me le faire. Vous me le remettrez ici, dans deux semaines, à la même heure. Vous pouvez disposer.

Il avait laissé couler l'insubordination et l'insulte, oui il aurait pû la sanctionner, mais ça n'aurait été que pur perte de temps, la jeune femme n'était pas du genre à craindre la sanction et à changer de comportement ensuite, ça n'aurait été qu'une pure perte de temps. Balkman observa la jeune femme, mais juste avant qu'elle ne parte il lança le plus calmement:

-Mustang a tué bon nombre d'Ishbals pendant la guerre, soit-disant ça le répugnait, et pourtant il a continué. Aujourd'hui il joue les humanistes, mais à l'époque il était comme les autres un meurtrier. Et efficace en plus. A votre avis quel est le plus connard des deux. Celui qui fait la guerre sans cas de conscience, ou celui qui la fait en dépit de toutes ses convictions les plus profondes, qui traine toutes ses croyances dans la boue et se renie ?

La jeune femme regarda son supérieur et lui fit un grand sourire.

-On trouvera toujours plus con que soi, et je ne nie pas que Mustang ait commis des atrocités tout comme vous. Mais il essaye de se racheter une conscience, ce que j'admire tout de même.

Elle fit une pause le temps de revenir vers le bureau de Balkman.

-Et vous savez quoi? Ça me gonfle de faire votre rapport alors...

La jeune femme pris l'un des feuillet officiel du Général de division et un de ses stylos, elle écrivit quelques phrases sur le bout de papier puis le tourna vers son supérieur. Sur le papier était inscrit les principales capacités dont devait disposer la chimère, à savoir la vue d'un aigle, l'odorat d'un loup, l'agilité du chat ainsi la peau du tatoo pour les capacités physiologiques. En ce qui concernait les capacités au combat elle avait inscrit les atouts des animaux les plus puissants, les dents du requin, les griffes du tigre, on pouvait aussi y ajouter le poison sécrété par le scorpion ou un de ces serpents venimeux, le dard du scorpion était aussi une arme efficace. Sans oublier que le réceptacle devait avoir une grande force physique pour supporter toutes les modifications ainsi qu'une force mentale et une obéissance inconditionnelle. Le réceptacle devait aussi avoir des instincts animaux, ce qui était le plus complexe à fusionner avec un corps qui n'en était pas doté à l'origine.

-Il y a ici tout ce que vous demandez pour faire une parfaite chimère de combat. Je vous souhaite bien du courage pour trouver et combiner tout ceci ensemble. Et même si vos scientifiques sont les meilleurs du monde je doute qu'ils puissent réussir une telle transformation.

La jeune femme reposa le stylo sur le bureau puis s'éloigna un peu.

-Je n'apprécie pas ce que vous faites, cependant j'aimerais jeter un coup d'oeil à ce que vos scientifiques réussiront à faire.

Atsuko esquissa un sourire, même si elle répugnait à voir les expériences des scientifiques elle se devait de se confronter à la réalité, c'était aussi son devoir de militaire. Il ne restait plus qu'à convaincre son supérieur, ce qui ne serait pas chose aisée si l'on en croyait le caractère bien trempé de celui-ci.