A cette époque de l'année, les rues sont encombrées de passants en tout genre faisant leurs achats de Noël. Souvent réunis par grappe entière devant les vitrines, ça bave, ça piaille, ça s'exclame de bonheur devant les habituelles vitrines mécaniques. Tu as envie de leur demander leur véritable âge mentale, à ses idiots qui t'empêchent d'avancer plus loin. C'est que tu as un rendez-vous important à ne surtout pas manquer. Une nouvelle filature avec un gros salaire à la clé.
Tu pestes, écrases « malencontreusement » les pieds d'une gamine sans le moindre état d'âme et te rues vers l'ouverture que te procures sa mère en se retournant pour t'insulter, sans doute. Filant comme une fusée, tu fends la foule par de grands coups de coudes. Tu nages vigoureusement et enfin t'extirpes de cette marée humaine après un dernier effort. En sueur, tu t'essuies le front tout en te jurant de ne jamais, non JAMAIS repasser par là avant fin février. Tu te touches de partout, t'assurant que tu as toutes tes affaires dans tes poches. Rassuré, tu repars d'un pas vif en direction de l'hôtel de la ville, situé à encore deux cents mètres de là.
Les trottoirs sont blancs, recouverts à certains endroits de verglas. Tu prends soin de les éviter, dansant presque sur les pavés. Agile comme un chat, tu tourbillonnes, véritable feu follet, t'amusant parfois d'une pirouette adroitement exécutée. Si tu n'étais pas en mission , nul doute que tu aurais été à la patinoire récemment installée près de la fontaine, à l'occasion des fêtes de Noël. Mais le sérieux avant tout.
Enfin tu arrives à destination. Un haut building un peu bling-bling se tient devant toi. Tu ne le regardes même pas et vas directement à l'accueil. Passant les portes d'un coup d'épaule, tu déboules au milieu du tapis rouge un peu comme un cheveu sur la soupe. Tes grosses godasses militaires noires laissent des tâches noirâtre sur la moquette cramoisie, au grand dam du personnel. Seulement,on ne tue pas la poule aux œufs d'or, raison pour laquelle ils te laissent relativement en paix. Tu ne prêtent pas non plus grande attention à leurs regards assassins, même si un petit sourire en coin démontre que tu y es un poil sensible. Parlant avec un accent du nord, tu commandes une chambre simple avec vue sur le patio, tout en bas de l'hôtel. Tu paies en liquide et te saisis d'un geste rapide de la clé avant de tourner les talons. Ayant une petite alise avec toi, tu n'as pas besoin des services du groom que tu congédies d'un geste lasse de la main. Il s'en va sans mot dire. L’ascenseur est long, trop long pour ton envie pressante d'enfin installer ton matériel de paparazzi et de finir presto ton boulot peu amène. Tu sais que cette affaire de fils de traînant avec des prostitués n'était pas la meilleure chose à accepter. Mais ce qui est fait est fait. Tu as déjà encaisser l'argent et la nuit à l'hôtel est payée par les soins de ton mystérieux patron.Tu ne vois pas de quoi tu pourrais te plaindre.
L'ascenseur s'ouvre dans un son de clochette et un chuintement discret. Tu t'y engouffre. Une autre personne t'y suis, un rouquin lui aussi. Tu le gardes à l’œil, prévoyant déjà de t'enfuir si besoin. Discrètement, tu lui bouches la vue et appuis sur tous les boutons de l'ascenseur afin d'être sûr de lui échapper au besoin, s'il se trouvait qu'il était un espion ou un membre trop regardant de l'armée...